Elisabeth Arnichand




Je commence ma recherche des origines d’Elisabeth Arnichand par l’acte le plus ancien connu jusqu’à présent pour le couple Lubac-Arnichand : l’acte de naissance de Marie Lubac datant du 20 messidor an IV (l’enfant étant né la veille, soit le 7 juillet 1796) :
                                                                      
Le père, Jean-Pierre Lubac, est dit natif de la commune de La Voulte, département de l’Ardèche,« domicilié au dit Bollène » : on ne dit pas depuis quand. Il est illettré.
La mère est « la citoyenne arnichand son épouse native de la commune de St maichal dadèche ».
 
L’acte suivant est la naissance de Jean Pierre, fils du « citoyen jean pierre lubat, cultivateur » qui déclare que la « citoyen elisabeth arnichant, son épouse en légitime mariage » est accouchée d’un enfant mâle auquel il a été donné le prénom de jean pierre.
La nouveauté est qu’on dispose alors du prénom de la mère. Mais ce qui est surtout remarquable dans cet acte, on verra plus tard pourquoi, c’est que son nom de famille semble être rajouté plus tard, ou par une autre personne sur des petits points de suspension :

citoyen arnichant

Il y a peut-être aussi une naissance en 1810, mais les actes n’étant pas numérisés pour cette année-là, on ne peut être sûr de la parenté. L’enfant, Elisabeth Catherine, n’a vécu qu’un jour.
Pas d’autre naissance, pas d’autre décès à Bollène concernant cette famille jusqu’à l’acte de décès de Jean Pierre Lubac :

deces-jpl

« Du neuf février mil huit cent seize
de Pierre lubac cultivateur âgé de cinquante cinq ans
décédé aujourd’hui a cinq heures du matin né a la Voûte
l’ardèche Domicilié a Bollène Epoux d’Elizabeth arnichamp    
(n.b.: on a bien là le son « an » dont on aurait pu douter sur les actes précédents)
sur la déclaration a moi faite Par Etienne arnichamp       (tiens, tiens ! un nouvel Arnichand ! à suivre)
cultivateur de Bollène beaufrer du defunt et Par Jean     (c’est le beau-frère ! la famille s’agrandit!)
Joseph Bourbonnet instituteur de Bollène et a signé
non led.arnichamp pour ne savoir »

Pierre Lubat serait donc né vers 1761 à La Voulte d’Ardèche.
 
Mais nous apprenons surtout dans cet acte de nouvelles informations concernant Elisabeth, en particulier que son frère Etienne est aussi installé à Bollène. Nous devrions pouvoir trouver des actes le concernant dans les registres de cette commune.
Commencons par les mariages. La table décennale de Bollène nous indique qu’il s’y est marié en 1816 à Rose Galon.
Cet acte (page 9) se trouve très riche en informations :

etienne-mariage

« Du vingt un septembre mil huit cent quatorze
acte de mariage d’etienne arnichand cultivateur
agé de trente ans né à St marcel D’ardèche le vingt
un juin mil sept cent quatre vingt quatre
, fils
majeur d’étienne arnichand décédé audit St marcel le quinze
janvier mil sept cent quatre vingt sept
et de marie anne
Ricard décédée au St Esprit Département du Gard le quatorze
juin mil huit cent six
. ledit Arnichand demeurant audit
St Marcel. »

Des actes comme celui-là, on en voudrait plus souvent ! une bise à celui qui l’a écrit !
Mais ne nous enthousiasmons pas trop vite…
 
1. Il nous faut pour l’instant laisser de côté l’acte de décès de Marie Anne Ricard à Pont-Saint-Esprit, les archives du Gard n’étant pas en ligne.
 
2. L’acte de naissance de Etienne, fils, nous confirme ce qui est écrit ci-dessus concernant sa naissance. (http://www.archinoe.net/ark:/39673/be94c0fd264f4e6c0eafc88caacd86ec)(deuxième acte)
 
3. L’acte de décès de Etienne, père, est déroutant (et décevant, pas de bise à la personne qui a photographié l’acte sans redresser le registre, le bord droit a disparu):

deces-etienne-pere

« etienne arnichand de la paroisse de st gloups
marié à st marcel de pierre de bernis avec maria…
fille de magdeleine peaullane, travailleur de
terre, mort au dit st marcel le quinze janvi
mil sept cent quatre vingt sept agé d’environ
quarante ans, munis des sacrements de l’église
a été enterré dans le cimetière dudt st marcel
le dix sept desd mois et an presents pierre labias
et jean estienne desserres illetré enquis Saladin »

Etienne Arnichand, père, est donc né vers 1747 dans une paroisse dont le nom commence par Saint-Gen… . Ce qui nous donne comme possibilités : Saint Genest-Lachamp, Saint-Genest-de-Beauzon, Saint-Genest-en-Coiron, ou même Saint-Georges, plus improbable, toutes communes bien éloignées de Saint-Marcel-d’Ardèche. Il peut aussi s’agir d’une paroisse dans une commune portant un autre nom…
Sa femme a perdu son nom de famille et se définit par le nom de sa mère (pour nous, c’est mieux, vous verrez).
 
Par quelle piste continuer ?
Je choisis de remonter dans le temps pour trouver un autre enfant du couple.
L’acte précédent date de 1779, un des premiers actes du registre 1779-1783 :

henry

« henry arnichant fils légitime a Estienne et de marianne caselin maries de St marcel de pierre de bernis, né le huitième jour du mois de janvier de l’année mil sept cent soixante dix neuf à onze heures du soir a été baptisé le dix des dits mois et an par nous vicaire sous signé, son parrain a été jean nougaret et sa marraine marie aufève… »

Aïe ! la mère d’Henry ne porte pas le même nom que celle d’Etienne ! Marianne Caselin serait décédée entre 1779 et 1783 et Etienne remarié à Marianne Ricard ?
Entre les deux naissances, pas d’acte de décès ni d’acte de mariage, que s’est-il passé ? Ayant étudié les actes de la région, je sais que les Arnichand sont à Saint-Montan, Saint-Thomé, Viviers, mais pas à Saint-Marcel. A Saint-Marcel, il ne me semble pas avoir vu d’Arnichand avant 1779, je fais donc l’impasse (en fait, il y a bien un mariage, mais dans l’état actuel des choses, il ne nous servirait pas, nous y viendrons plus tard).
 
J’ai le choix entre deux hypothèses. Je choisis d’abord la suivante :
Si on ne trouve pas dans les registres catholiques les actes de décès de Marie Anne Caselin et de remariage d’Etienne avec Marie Anne Ricard, c’est peut-être qu’ils sont protestants. Je ne me rappelle pas avoir vu un seul Arnichand protestant, et d’ailleurs, il est enterré selon le rite catholique -bien que ce ne soit pas si simple… Mais peut-être sa femme l’était-elle ?
Après des recherches rapides, je ne trouve pas de mariage Arnichand sur les registres catholiques de Saint Genest-Lachamp, Saint-Genest-de-Beauzon, Saint-Genest-en-Coiron dans les années 1770. Rien non plus dans les registres protestants.
 
En ce qui concerne les Lubac, rien entre 1750 et 1770 dans les actes catholiques non plus à La Voulte, une seule occurrence d’un décès, c’est peu significatif. Je me retourne donc aussi vers les registres protestants de La Voulte-sur-Rhône.
Je trouve, entre autres, dans le registre de 1752 à 1761, PRD 03-1, pasteur Alexandre Vernet, page 172:
Jean Pierre Lubac, né le 22 août 1756, fils de Paul et de Marie Manson, du lieu des bergerons, paroisse de Saint-Didier. C’est sur la commune d’Alboussière, une quinzaine de kilomètres au nord de La Voulte.
Tant que nous n’aurons pas d’acte ou de contrat de mariage, nous ne pourrons rien affirmer. Mais la piste des protestants n’est pas totalement à exclure, pour cette lignée-là du moins.
Les registres protestants sont très longs à dépouiller, j’abandonne pour l’instant.
 
Je reprends donc les recherches concernant cette fois le décès d’Elisabeth Arnichand, veuve Lubac, qui pourrait nous donner des indications plus précises sur sa naissance.
Son acte de décès ne figure pas dans les tables décennales de Bollène, ni à « Arnichand »,  ni à « Lubac ».
On sait qu’elle ne s’est pas remariée à Bollène. Rien non plus dans les publications de mariage. Je tente ma chance dans les recensements.
En 1836, elle vit à côté de chez sa fille, épouse Estran, avec un couple de trente cinq ans, les Servier. (tome 2 page 60) : « Arnichand, M. Elisabeth, 60 ans »
En 1841, elle vit toujours avec sa fille : « Lubac, Elisabeth, veuve » (tome 2 page 59).
En 1845, elle ne figure plus sur les recensements.
Elle est peut-être : vivante ailleurs, décédée à Pont-Saint-Esprit, décédée dans un hôpital d’une autre ville. Je recherche sur les communes d’Orange et de Montélimar, les hôpitaux les plus proches. Rien.
 
Il me reste alors une solution : l’exploration systématique des autres actes de la famille Arnichand à Bollène, soit les enfants d’Etienne.
Petit aparte : Etienne Arnichand est Médaillé de Sainte-Hélène (cela veut dire que, combattant des armées napoléoniennes, il était encore vivant en 1857 – de fait, il est décédé en 1861). Il a fait les campagnes de 1805 à 1814, dans l’artillerie.
Selon les tables décennales, il a eu quatre filles avec Rose Galon. Or sur un arbre en ligne sur Geneanet, il a aussi un fils, Joseph Etienne, né à Bollène le 31 janvier 1830. Je recherche l’acte sur les registres. Pas d’acte Arnichand pour cette date, ni dans les jours suivants. Je regarde de plus près l’acte concernant le 31 janvier :

joseph-etienne-richard

« L’an mil huit cent trente et le premier février à dix heures du matin, devant nous Pierre François Valere de Gaillard-Lavaldene, Maire, officier de l’état-civil de la ville de Bollène (Vaucluse) est comparu Etienne Richard cultivateur domicilié à Bollène, lequel nous a presenté un enfant de sexe masculin né hier à trois heures du soir de lui déclarant et de Rose Galon son épouse et auquel il a donné le prénom de Joseph Etienne […] qui ont signé, non le dit Richard pour ne le savoir. »

!!

Je recherche alors sur les tables entre 1841 et 1845 le décès d’une Elisabeth Richard

deces-elizabeth

« L’an mil huit cent quarante cinq et le vingt neuf mars à onze heures du matin devant nous Etienne Violet, maire officier de l’état civil de la ville de Bollène (Vaucluse) sont comparus MM Jean François Donnier, âgé de septante quatre ans, et Auguste Pelgrin, âgé de quarante quatre ans, administrateurs des Hospices Civils de cette ville, domiciliés à Bollène. Lesquels nous ont déclaré qu’Elizabeth Richard, sans profession, âgée de septante deux ans, née à Saint-Marcel d’Ardèche, domiciliée à Bollène, veuve de Pierre Lubac, est décédée dans les dits Hospices aujourd’hui à trois heures du matin ainsi que nous nous en sommes assuré en nous y transportant et ont les déclarants signé avec nous le présent acte après lecture faite. »

…bon. Ça, c’est fait…
Ils y tiennent absolument, elle est née à Saint-Marcel-d’Ardèche… j’y retourne.
72 ans en 1845, cela veut dire qu’elle est née vers 1773.
Je remonte donc les actes depuis 1779. Pas d’acte de naissance en 1775, 1774, 1773, 1772.
Et là… un acte de mariage :

mariage-cazelin

« Mariage Etienne arnichant et marianne Cazelin
L’an mil sept cent soixante douze et le
vingt huitième jour d’octobre après une seule
publication des bans légitimement faite
dans cette église paroissiale de st marcel de
pierre de bernis sans découvrir aucun
empêchement ni cannonique ni civil dispense
obtenue des deux autres publications de mr l’abbé
de Rochemaure vicaire général nous soussignés
avons solennelement beni selon la forme
du st concile de trente le mariage d’entre
etienne arnichant fils légitime à feu
antoine arnichant et à feu claudine
vigne
natif du lieu des baumes de montbrun
paroisse de st gineis en coiron
habitant
depuis sept à huit mois dans le présent
lieu de St marcel d’une part, et marianne
cazelin fille légitime à feu joseph cazelin
et magdeleine paulhand de St marcel
[…] »

Etienne Arnichand s’est marié en 1772 avec Marianne Cazelin « fille de magdeleine paulhand », celle qui figure aussi sur l’acte de décès. Elle est donc encore vivante en 1787, c’est elle aussi qui figure sur l’acte de mariage d’Etienne, fils, sous le nom de Marianne Ricard. Il n’y a donc eu qu’un seul mariage et les actes entre les deux dates correspondent aux mêmes personnes :
Etienne Arnichant et Marianne Cazelin > parents de Henry en 1779
Etienne Arnichant et Marianne Ricard > parents d’Etienne en 1784.
 
J’ai dû passer l’acte de naissance d’Elisabeth, je reprends le registre.

naissance-elisabeth

« L’an mil sept cent soixante quatorze et le
dix mars a été sollennellement baptizée dans
l’église de st marcel de pierre de bernis marie
elizabeth
née le même jour fille légitime
a etienne richard et a marianne ricard
mariés
habitants du dit lieu le parrain a été joseph autageon
sa marraine marie allamel presents joseph
gerboux et le parrain tous illettrés de ce
enquis et requis »

Sans l’acte de décès d’Elizabeth, je n’aurais pas pu repérer cet acte de naissance. On comprend aussi l’hésitation sur son nom dans l’acte de naissance de son fils Jean Pierre.
 
Nous nous retrouvons donc devant deux nouvelles énigmes :
– pourquoi Etienne Arnichand est-il appelé Richard ? ainsi que sa fille et son petit-fils ?
– pourquoi Marianne Cazelin est-elle nommée aussi Ricard ?
 
Remonter la généalogie d’Etienne se révèle ensuite assez facile, en suivant les actes et les arbres en ligne. On remonte jusqu’aux premiers ancêtres Arnichant connus à Mirabel (région du Coiron) :
Antoine Arnichant et Izabeau (Elisabeth!) Richard, mariés vers 1675 à Mirabel… l’explication du surnom, probablement.
 
Sur l’acte de mariage, on peut noter que le terme « légitime » a été raturé. Le nom du père est notoirement connu mais les parents ne sont pas mariés.
 
En faisant une recherche ( sur Généanet) sur le nom de la mère, on trouve rapidement une Madeleine Paulhian, mariée en 1739 à Saint-Marcel d’Ardèche, à Pierre Ricard (arbre de Thierry Granier). Voilà l’origine du second surnom ! En parcourant les registres, on retrouve le décès de Pierre Ricard en août 1748 à Saint-Marcel d’Ardèche. Viennent ensuite deux actes de décès d’enfants de ce couple en 1749… puis l’acte de naissance de « Jean Etiennne… fils naturel de magdeleine paoulian » en 1754.
Je vois les choses ainsi : après le décès de son mari, Madeleine « fréquente » Joseph Cazelin, peut-être de passage dans la région (marchand, militaire?). Elle a deux enfants : Marianne alors qu’elle vit notoirement avec lui, et Jean Etienne, alors qu’il est déjà reparti, ou décédé. Elle revient alors vivre à Saint-Marcel, où elle est connue comme la veuve de Pierre Ricard. Dans le langage courant, ses enfants en prennent aussi le nom, qu’ils emploient parfois eux-mêmes.
Une recherche sur le nom Cazelin donne une naissance de Marie Cazelin à Saint-Martin (le supérieur?) en 1750, mais on trouve pas d’acte. Les actes de Saint-Martin d’Ardèche, commune limitrophe de Saint-Marcel ne sont pas en ligne pour la période de 1749 à 1754, dates possibles de la naissance de Marianne.
Il vaudra mieux donc s’en reporter à l’acte de décès de Marianne Ricard à Pont-Saint-Esprit, qui nous dira – peut-être – où et quand elle est née.
 
Les ancêtres de Magdeleine Paulhand se retrouvent sur l’arbre de Didier Maurin par exemple:
http://gw.geneanet.org/kourcoutis?lang=fr&pz=manon&nz=maurin&ocz=0&p=magdeleine&n=pouillan
 
Nous ne sommes pas au bout de nos peines. Il nous faut encore trouver l’acte de mariage d’Elisabeth et Pierre Lubac. Les publications de mariage de Saint-Marcel d’Ardèche existant en ligne pour cette période, il nous reste bon espoir.

publi-mariage

« Le quatrième germinal lan quatre de la republique française
une et indivisible devant la porte principale de la maison commune
a midy a été publié le mariage du citoyen jean pierre Lubat cultivateur
de la voute fils légitime a feu Claude Lubat et a feu Marguerite gaillard
agé de trente quatre ans deux mois d’une part et la citoyene
Elisabet Arnichand fille a feu Estienne arnichand
et a marianne Cazelin, âgée de dix huit ans six mois d’autre part
dont l’extrait a été publié au lieu ordinaire par moi joseph Berenger
officier public à St marcel d’ardèche l’an et jour susdits. »

Cette fois-ci, les bords apparaissent bien, tout semble parfait… sauf que… Elisabeth est âgée de dix huit ans et six mois !
C’est-à-dire qu’elle est née vers septembre 1777 ! Voyons voir les registres….
Je n’avais pas vu cet acte, et heureusement, d’ailleurs !

maria-madeleine

Nous voilà bien ! C’est l’acte de baptême de Marie Magdeleine Arlichant, née le vingt et un juillet 1777, qui est fille d’Etienne Arlichant et Marianne Fabret… Ne nous laissons pas impressionner: il y a confusion avec le nom du parrain. Cette Madeleine est décédée à l’âge de quatorze mois. Sur l’acte de décès, la parenté est correcte, si on peut dire (Etienne Arnichand et Marianne Ricard).
 
Au moment de la publication de mariage, on peut dire que les officiers de l’état-civil ont une bonne raison de sélectionner cet acte-là, puisque « le vrai » est énigmatique et introuvable pour eux s’ils ne connaissent pas l’histoire de la famille. De toute façon, personne ne sait lire…
Espérons que les renseignements concernant Jean Pierre Lubac soient exacts !

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